Confrontée à un volume d’information toujours croissant, l’Europe découvre, ravie, la valeur du traitement automatique des langues, ciment de la construction européenne.
Lors du récent sommet LT-Innovate, Alexander
De Croo, vice premier ministre de Belgique et ministre de l’Economie
digitale ainsi que Robert Madelin,
directeur général de la DG CONNECT à la Commission européenne, ont
envoyé un message très clair à la communauté du Traitement Automatique
des Langues (TAL) : « Nous comprenons aujourd’hui l’importance de votre
discipline et le rôle qu’elle joue dans le développement économique de
l’Europe. Nous apprécions aussi votre capacité à transformer et adapter
votre discours à nos préoccupations économique et politique ».
Ce message, illustré dans les interventions régulières des
intervenants politiques, souligne la prise de conscience du rôle
fondamental du traitement automatique des langues.
Cette « compréhension déclarée » serait ainsi liée à la
transformation du discours de notre discipline envers les autorités. Je
n’en suis pas aussi convaincu que cela. Je n’ai pas le sentiment que
notre discours ai subitement ou progressivement changé fondamentalement,
et ce quelle que soit la discipline concernée, la traduction, la
reconnaissance vocale ou encore l’analyse sémantique.
Cette soudaine prise de conscience des autorités européenne me semble
être davantage une conséquence de leur difficulté, voire de leur
impossibilité à faire face au volume d’information qui les submerge
aujourd’hui.
En ce sens, nous pouvons rappeler à la communauté et aux autorités,
que l’un des 3 V du Big Data – la Variété - caractérise intrinsèquement
la masse des données qu’il faut appréhender et traiter.
C’est bien cet enfant de l’ère numérique qui a éveillé les
consciences sur l’importance des données, leur nature, leur diversité,
leur masse, pour l’aide à la décision technique, économique et
politique.
Cependant, quelles qu’en soient les raisons, cette prise de
conscience, dans le contexte du « Digital Agenda for Europe » est une
excellente nouvelle pour notre communauté. Celle-ci, rappelons-le, est
composée à la fois d’universitaires, mais également d’un grand nombre de
PME à travers toute l’Europe. Il apparaît donc aujourd’hui que nous
sommes clairement identifiés et reconnus pour nos expertises variées et
notre valeur contributive au développement et aux enjeux européens.
Nous le savons, et j’ai pu le vérifier lors de notre réunion
annuelle, toutes les entreprises engagées de notre communauté
connaissent bien la manière dont elles peuvent contribuer à ce
développement stratégique. En revanche, trop nombreuses sont celles qui
finissent par baisser les bras au moment de se confronter aux mécanismes
administratifs complexes et statutaires de l’Europe. Nous sommes en
général des entreprises de petite taille et malheureusement pas toujours
correctement équipées pour échanger d’égal à égal avec les autorités
Européennes à l’occasion de projets de type H2020 ou autre. Nous avons
parfois le sentiment regrettable qu’au cours des 15 dernières années, le
fossé entre nous continue inexorablement de se creuser, qu’une
communication simple et directe reste toujours difficile et qu’au final,
l’Europe ne sait pas nous accompagner.
Il est urgent et impératif que l’Europe assume et entretienne un rôle
d’accompagnement stratégique – à l’instar des États-Unis – auprès de
nos PME innovantes, de nos start-up, parfois fragiles, afin d’assurer
des perspectives de développement pérenne à moyen et long terme.
L’Europe doit comprendre l’importance stratégique des technologies
innovantes que nous développons pour servir, entre autre, l’indépendance
technologique, économique, culturelle et juridique de notre continent
européen.
Il est heureux que nos représentants européens prennent conscience de
notre existence technologique et de notre valeur associée. Il est temps
maintenant que notre Europe administrative se mette à notre hauteur
afin de nous apporter une aide active en nous impliquant dans des
projets d’exécution et de production. L’un des premiers bénéfices
attendus permettrait certainement de simplifier et d’optimiser ses
propres rouages administratifs...